le 27 janvier
le 27 janvier
Le 27 janvier c’est la journée de la Mémoire des génocides et de la prévention des crimes contre l’humanité. On rend hommage à la mémoire des victimes de l’Holocauste, de tous les génocides. C’est une façon de lutter contre l’antisémitisme, le racisme et toutes les formes d’intolérance qui visent un groupe pour sa religion, la couleur de sa peau, ses idées, son appartenance sociale. Le 27 janvier est la date qui a été choisie car c’est le 27 janvier de l’an 1945 que les troupes soviétiques entrent dans le camp de concentration nazi d’Auschwitz-Birkenau. Quand les soldats de l’armée rouge sovietique entrent dans le camp, ils découvrent 7000 survivants, tous dans un état lamentable. Avant de quitter le camp, les nazis avaient tenté d’effacer les traces de cette horreur. Ils avaient fusillé de nombreux prisonniers, dynamité les fours crématoires, mais impossible de combler toutes les fosses communes… Tout cela n’a pas empêché d’autres massacres. Alors souvenons nous. Pour ne pas oublier, les guides de Guiderome ont voulu aussi commémorer le 27 janvier le jour de la mémoire, chacune à sa façon.
Pour Florence Gino Bartali
Gino Bartali c’est un vélo contre l’antisemisme. Il est né à Florence en 1914 et il est connu pour ses triomphes. Il a remporté 3 Tours d’Italie en 1936, 1937 et 1946 et deux Tours de France! Mais il y a un aspect de sa vie que nous avons découvert après sa mort. En 1943, pendant l’occupation allemande de l’Italie, Gino Bartali, est contacté par l’archevêque de Florence le cardinal Elia Della Costa et le rabbin Nathan Cassuto. On lui demande de porter de faux documents aux familles juives cachées par les prêtres dans la campagne toscane. L’archevêque l’avait choisi car ‘ »un champion qui s’entraîne ne sera jamais contrôlé ». En vélo Gino pédale de Florence à Assise, là il y avait une imprimerie clandestine. Il fait des dizaines de voyages. Il cache dans le guidon et dans la selle de sa bicyclette les faux papiers. Avec ce stratagème, de septembre 1943 à juin 1944, il réussit à sauver 800 israélites condamnés à une mort certaine. Sa générosité est allée jusqu’à cacher une famille juive dans sa cave à l’insu de sa femme. Pensez simplement que cette histoire incroyable a été révélée par son fils après sa mort, parce que Gino n’a jamais voulu en parler. Il disait « le bien se fait, mais ne se dit pas ». En septembre 2013, il a été déclaré « Juste parmi les Nations » par Yad Vashem » (Agence nationale pour la mémoire de la Shoah) de l’État d’Israël.
Les héros du Lac de Côme
A Côme il y a une mémoire faible de la présence de juifs, mais quand la situation empire après le 8 septembre 1943, en train ou sur les chemins muletiers frontaliers les évasions audacieuses des juifs pour s’expatrier en Suisse se multiplient, à l’aide du peuple de Côme et des villages du lac bordant la Suisse. Lanzo d’Intelvi était alors l’une des stations préférées de la bourgeoisie milanaise, y compris juive. Parmi ces derniers, les Camerini, les Vigevani, les Goldschmidts, les Milla, les Aboaf, les De Benedetti, les Segre et les Reinach, qui avaient une grande maison. Les histoires des “Justes parmi les nations” se multiplient, leurs conduites héroïques au risque de leur vie sont aujourd’hui racontées aux élèves avec orgueil. Giorgio Perlasca, qui se fit passer pour un diplomate espagnol et sauva la vie à plus de 5000 juifs hongrois. Giuseppe Grandi, gardien de la famille Reinach (morte déportée à Auschwitz), qui mourut à Buchenwald, pour les avoir aidés à s’échapper (et des centaines d’autres aussi). Liliana Segre, survivante d’Auschwitz, qui fut emprisonnée à Côme avant d’être emportée … Aldo Pacifici, le seul comasque mort à Auschwitz, a sa pierre d’achoppement en ville là où il fut arrêté. Ines Figini n’était pas juive, partisane ou antifasciste. C’était une ouvrière qui avait pris le parti de certains collègues pendant la première grève du secteur textile de Côme, contre l’occupation nazi-fasciste en mars 1944. Elle s’est ainsi retrouvée dans les camps de concentration de Mauthausen, Auschwitz-Birkenau et Ravensbrück. Ses paroles ont été rassemblées dans le livre « Mais tu reviens toujours. Ines Figini, la vie au-delà du lager ». Elle a déclaré à plusieurs reprises qu’elle avait trouvé le pardon, au fil des ans, un pardon spontané.
A Milan le quai 21
A Milan la communauté juive a toujours été plutôt nombreuse, mais jamais polarisée dans un quartier spécifique ou Ghetto. En revanche, la ville est étouffée par le souvenir d’une responsabilité terrible. Elle fut le point de départ de centaines de déportés envoyés aux camps nazis en Pologne et en Allemagne. Notamment les trains partant de la voie 21 de la Gare Centrale de Milan. C’était un rail autrefois destiné au service postale et devenu, entre décembre 1943 et janvier 1945, le début d’un voyage sans retour pour 23 convois bourrés d’un nombre indéfini de passagers malheureux. Le quai 21 est aujourd’hui un mémorial ouvert au public avec la voie ferrée intacte telle qu’elle était à l’époque, un espace exposition et le mur de la mémoire avec les noms des victimes dont on a pu connaître l’identité. Une curiosité : la voie 21 se trouve au niveau du rez-de-chaussé, tandis que les autres voies de la Gare de Milan, destinées au transport « officiel » des passagers, sont à un niveau surélevé. Sur la paroi le long du quai 21 il y a une mosaïque aux dalles colorées qui représente le Roi d’Italie Victor Emmanuel III qui rencontre Mussolini ; le visage de ce dernier à été effacé à la fin de la dictature fasciste en Italie.
A Rome le syndrome K
C’est l’histoire de trois médecins romains de l’hôpital des Fatebenefratelli situé sur l’île Tibérine. Un hopital juste en face du Ghetto et qui le 16 octobre 1945 a vu arriver des dizaines d’israelites echappant aux rafles nazies. Pour sauver ces pauvres gens d’une mort certaine, ils inventèrent une maladie dangereuse et contagieuse mais complètement inexistante. Les héros sont Giovanni Borromeo, Vittorio Sacerdoti et Adriano Ossicini. Ils ont empêché la déportation de plus de 50 personnes. La syndrome de K comme Kapler l’officier nazi chargé de vider le ghetto de Rome se manifestait sous forme de toux, vomissements, maux de tête. Les trois médecins osèrent dire en présence des officiers nazis venus prendre les fugitifs : »Messieurs les officiers, ne soyez stupides, alors reculez ». Ces pauvres persécutés furent cachés pendant des mois dans le pavillon maladie infective de l’hôpital. Les nazis convaincus de la mortalité de cette maladie n’iront pas plus loin «Ils sont morts tout de même» disaient ils. Sur une population juive de près de 12.000 personnes, près de 1.200, dont deux cents enfants, prendront le chemin des camps de la mort. Les survivants furent 15 hommes, une femme, aucun enfant.
La communauté juive de Catane
Les juifs de Catane constituaient, en nombre, la communauté la plus importante du sud de l’Italie. Les Juifs s’installèrent dans presque tous les centres siciliens entre les XIVe et XVe siècles. On les trouvait dans des villes telles que Messine, Syracuse, Palerme, Trapani, Catane. Catane était un centre très important. Dans la ville vivaient des astronomes, des mathématiciens, des docteurs en médecine des disciplines les plus variées, des artisans et des commerçants de toutes sortes. La via Gesiria, encore aujourd’hui, rappelle l’impôt (gizya) que la communauté devait payer au gouvernement espagnol afin de pouvoir travailler. Un autre élément important qui rappelle l’activité de la communauté juive de Catane est le candélabre à sept branches (Menorah) construit sur une tour du château d’Ursino, le manoir édifié par l’empereur Frédéric II de Souabe, conçu par Riccardo da Lentini. La grande Giudecca de Catane possédait deux synagogues, un hôpital, un abattoir et bien sûr un cimetière, ce dernier situé à l’extérieur des murs près de Porta della Giudecca. Le quartier juif était traversé par le Judicello, dont les eaux, entre autres, étaient essentielles pour le bain rituel des femmes.
Les juifs à Lecce
Lecce conserve une page liée à l’histoire juive et à la Giudecca. La présence juive à Lecce est datée au moins à partir de 1492 quand de nombreux groupes se sont installés dans le sud de l’Italie pour échapper à l’inquisition espagnole. Les fouilles récentes de 2006 sous le Palais Taurin ont restitué les restes d’une synagogue avec quelques micves ou bassins pour les rites de purification ainsi que d’une mezuza qui contenait la Torah le texte sacré hébreu. En 1541, l’édit du roi Charles V marqua l’expulsion définitive des juifs du Salento, ces derniers n’y retourneront en tant que réfugiés de guerre qu’en 1945. Lecce abrite le Musée juif que nous vous invitons à découvrir lors d’une visite guidée!
Les juifs de Naples
À l’époque gréco-romaine à Naples, il y avait déjà une communauté de juifs, généralement très riches, des commerçants qui s’étaient installés dans le quartier aujourd’hui appelé Pendino, proche de la côte. A l’époque aragonaise, quand de nombreux Juifs furent expulsés d’Espagne, Naples accueillit plusieurs fugitifs mais ils furent renvoyés définitivement en 1539. Ils ne revinrent que pour une courte période sous le règne de Charles III de Bourbon et de nouveau renvoyés en 1747. Et finalement ils se sont définitivement rétablis en 1831 vivant un âge d’or grâce à la famille Rothschild qui était présente à Naples. Cependant, pendant la Seconde Guerre mondiale, certains ont été déportés en janvier 1944 à Auschwitz et ont été tués. Lors des fameux quatre jours à Naples (une révolte populaire contre l’occupation allemande) on a sauvé plusieurs Juifs de la déportation. Aujourd’hui, les plaques dites Stolpersteine, créations de l’artiste allemand Gunther Demmig pour se souvenir des victimes de la communauté juive de Naples pendant l’Holocauste, ont été placées sur la Piazza Bovio
Les juifs de Syracuse
En 1492, date de l’édit d’expulsion des Juifs, promulgué par le roi FERDINAND D’ARAGON, la communauté Juive de Syracuse comptait plus de 6000 personnes. Le témoignage le plus important de cette époque est représenté par l’ancien MIKVAH, un bain rituel intact, qui date du VIe siècle après J.C. Un lieu sacré, à la spiritualité encore évidente, trouvé par hasard il y a 22 ans, au milieu du vieux quartier de la « GIUDECCA« . Tout près de cet endroit magique, les recherches les plus récentes ont permis d’identifier l’ancienne Synagogue, dont on avait perdu la mémoire, avec la petite église de Saint Jean Baptiste. Son portail gothique, surmonté par une rosace d’origine, nous parle encore des artisans raffinés qui peuplaient cette partie de la ville et qui choisirent de se convertir à la religion chrétienne pour ne pas abandonner une terre qu’ils considéraient comme leur mère patrie.
Les juifs de Sardaigne
Nous pourrions commencer un discours sur la présence juive en Sardaigne avec le mot CHENABURA qui est encore employé dans la langue sarde et qui signifie « vendredi ». Les premiers témoignages de la présence hébraïque en Sardaigne remontent à 19 après J.C. quand selon l’Empereur Tiberius la communauté juive de Rome lui semblait devenir trop grande. En suite, à partir de la conquête aragonaise de la Sardaigne du 14ème siècle, la présence juive se verra surtout dans les centres urbains comme Oristano, Sassari et Iglesias, Alghero et Cagliari. Plusieurs juifs étaient artisans, tisseurs, charpentiers, orfèvres, médecins et changeurs d’argent. En Sardaigne dans les quartiers juifs on construisait des synagogues. Mais elles furent détruites après l’adoption de l’édit de l’Alhambra de 1492 qui imposait l’expulsion obligatoire de toutes les communautés juives du Royaume espagnol si elles n’acceptaient pas de se convertir au catholicisme. Donc, en Sardaigne il n’y a pas des ghettos proprement dit. Beaucoup de noms de famille juives de ceux qui s’étaient convertis pour rester en Sardaigne avaient été modifiés et adaptés à la langue sarde et ils sont encore très présents dans la population actuelle. La ville de Alghero en 2013 a nommé une place dans l’ancienne citadelle « la Juharia » en souvenir de la zone où était le quartier juif.
Sur le ghetto de Rome
Le Ghetto de Venise
Du 8 septembre 1943 au mois d’avril 1945, à peu près 200 juifs vénitiens furent déportés, parmi lesquels des familles entières furent tuées dans les camps de concentrations. L’histoire de la communauté juive à Venise est absolument fascinante, elle se mêle au cosmopolitisme de cette ville, à son économie, à son histoire, en l’enrichissant beaucoup d’un point de vue littéraire, philosophique, politique. Son quartier est resté intacte, juste ses portes ne sont plus là, mais leur marque est évidente comme tout le reste : maisons, synagogues, boutiques, restaurants… Et l’on peut encore y revivre la magie et le mystère ressentis par l’enfant Hugo Pratt dans l’introduction de sa bande dessinée « Fable de Venise », où il raconte ses visites à Madame Bora Levi en compagnie de sa grand-mère vénitienne.
Pour conclure, cet article sur le 27 janvier, quelqu’un disait : « Je ne connais qu’une seule race, la race humaine ». Voici le lien des justes parmi les nations yad vashem